J’traînais pas les pieds ni les guiboles, j’ai toujours aimé l’école.
Je m’y suis accrochée tant que j’ai pu, c’était une belle histoire d’amour, que les hasards de la vie m’ont fait interrompre brutalement, et trop prématurément : une relation au goût amer d’inachevé, que chaque rentrée des classes me remémore douloureusement.
La veille de ce jour béni où j’allais mettre mes vêtements tous neufs et mes chaussures juste sorties de la boîte, je ne tenais pas en place et dormais rarement.
Tout était prêt, livres d’occasion, cahiers immaculés, stylo plume affûté et agenda soigneusement customisé maison.
Ca embaumait le cuir, celui des chaussures neuves et celui du cartable ciré.
L’automne vosgien était déjà là, la pluie aussi, et les vacances à la mer paraissaient bien lointaines. « Un temps de rentrée », comme on dit chez nous.
Les deux mois de congés partagés avec les gamins du voisinage s’étaient éternisés, et l’envie de voir ou revoir d’autres visages, d’apprendre de nouvelles choses, n’en était que plus forte.
Ma soif de connaissances était intarissable, et j’en arrivais à apprendre tout et n’importe quoi, juste pour l’apaiser un peu : les mots étranges du dictionnaire, les capitales des pays d’Afrique…
La reprise c’était le début de nouvelles aventures, de nouvelles amitiés, découvertes, matières.
J’étais de nature assez dissipée, la boute-en-train de la classe, mais paradoxalement l’une des plus studieuses, au grand désespoir de certains.
Lorsque par bonheur je tombais sur un professeur, un instituteur, passionné par son métier, le plaisir n’en était que plus grand et je savais m'assagir.
Comment convaincre, enseigner et transmettre quand on n’est pas persuadé soi-même de ses dires ?
Ce ne fut pas le cas de cet instituteur de cours moyen, qui distillait l’humour dans chacun de ses cours, ni celui de ce petit bout de femme qui m’a fait découvrir en 6ème la langue de Shakespeare par des chansons de Simon and Garfunkel.
Pas le cas non plus de ce professeur de français et cet autre de philosophie à l’époque du lycée.
Mon désir d’écriture déjà latent s’est vu pousser des ailes, et mes lectures se sont ouvertes à de nouveaux horizons.
Je buvais littéralement leurs paroles, m’abreuvais de leur savoir sans en laisser filer la moindre goutte.
J’étais la première devant la porte, même si je n’intervenais que rarement dans leurs cours.
Juste pour être sûre d’être en bonne place pour assister au spectacle
Ils n’avaient pas de notes, pas de pense-bête, juste leur cœur et l’étincelle dans leurs yeux.
En un quart de seconde ils savaient transporter l’auditoire, même le plus récalcitrant, dans leur monde fait de lettres, d’histoires d’amour et de mort, de mythes et de réalités tragiques.
Regardant tour à tour dans le vide, scrutant la salle ou prenant soudainement à partie un élève, ils interprétaient le rôle de leur vie dans chacun de leurs récits.
Ils prônaient l’ouverture d’esprit, la curiosité sous toutes ses formes, et surtout l’expression.
Expression des sentiments, des avis, des doutes, des certitudes, des idées, par la parole ou par l’écrit…aux origines du commencement de mon envie d’écrire, de textes griffonnés sur tout et rien, de poèmes, plus tard de ce blog, et après ?
J'traîne pas les pieds mais des casseroles, j’admire toujours l’école.
Je m’y suis accrochée tant que j’ai pu, c’était une belle histoire d’amour, que les hasards de la vie m’ont fait interrompre brutalement, et trop prématurément : une relation au goût amer d’inachevé, que chaque rentrée des classes me remémore douloureusement.
La veille de ce jour béni où j’allais mettre mes vêtements tous neufs et mes chaussures juste sorties de la boîte, je ne tenais pas en place et dormais rarement.
Tout était prêt, livres d’occasion, cahiers immaculés, stylo plume affûté et agenda soigneusement customisé maison.
Ca embaumait le cuir, celui des chaussures neuves et celui du cartable ciré.
L’automne vosgien était déjà là, la pluie aussi, et les vacances à la mer paraissaient bien lointaines. « Un temps de rentrée », comme on dit chez nous.
Les deux mois de congés partagés avec les gamins du voisinage s’étaient éternisés, et l’envie de voir ou revoir d’autres visages, d’apprendre de nouvelles choses, n’en était que plus forte.
Ma soif de connaissances était intarissable, et j’en arrivais à apprendre tout et n’importe quoi, juste pour l’apaiser un peu : les mots étranges du dictionnaire, les capitales des pays d’Afrique…
La reprise c’était le début de nouvelles aventures, de nouvelles amitiés, découvertes, matières.
J’étais de nature assez dissipée, la boute-en-train de la classe, mais paradoxalement l’une des plus studieuses, au grand désespoir de certains.
Lorsque par bonheur je tombais sur un professeur, un instituteur, passionné par son métier, le plaisir n’en était que plus grand et je savais m'assagir.
Comment convaincre, enseigner et transmettre quand on n’est pas persuadé soi-même de ses dires ?
Ce ne fut pas le cas de cet instituteur de cours moyen, qui distillait l’humour dans chacun de ses cours, ni celui de ce petit bout de femme qui m’a fait découvrir en 6ème la langue de Shakespeare par des chansons de Simon and Garfunkel.
Pas le cas non plus de ce professeur de français et cet autre de philosophie à l’époque du lycée.
Mon désir d’écriture déjà latent s’est vu pousser des ailes, et mes lectures se sont ouvertes à de nouveaux horizons.
Je buvais littéralement leurs paroles, m’abreuvais de leur savoir sans en laisser filer la moindre goutte.
J’étais la première devant la porte, même si je n’intervenais que rarement dans leurs cours.
Juste pour être sûre d’être en bonne place pour assister au spectacle
Ils n’avaient pas de notes, pas de pense-bête, juste leur cœur et l’étincelle dans leurs yeux.
En un quart de seconde ils savaient transporter l’auditoire, même le plus récalcitrant, dans leur monde fait de lettres, d’histoires d’amour et de mort, de mythes et de réalités tragiques.
Regardant tour à tour dans le vide, scrutant la salle ou prenant soudainement à partie un élève, ils interprétaient le rôle de leur vie dans chacun de leurs récits.
Ils prônaient l’ouverture d’esprit, la curiosité sous toutes ses formes, et surtout l’expression.
Expression des sentiments, des avis, des doutes, des certitudes, des idées, par la parole ou par l’écrit…aux origines du commencement de mon envie d’écrire, de textes griffonnés sur tout et rien, de poèmes, plus tard de ce blog, et après ?
J'traîne pas les pieds mais des casseroles, j’admire toujours l’école.
26 commentaires:
Que l'école soit vosgienne... ou catalane, les mêmes odeurs d'école me viennent à l'esprit. Ton texte aurait pu très bien être écrit en d'autres lieux, en d'autres temps... Tu sais être éternelle...
Texte très touchant, pour un prof à la retraite...
Je classerai les enseignants en trois catégories :
- Les pas fameux (comme dans tous les métiers)
- Les normaux, qui font leur boulot avec conscience et honnêteté,
- Ceux qui ont l'étincelle qui accroche les élèves, quelques-uns, ou beaucoup.
Il arrive que l'on passe d'une catégorie à l'autre dans le cours d'une même journée, et parfois on le sent terriblement.
J'ajouterai qu'enseigner aux élèves "lisses" m'a toujours profondément ennuyé. Ils n'auraient pas besoin de nous ! Nous leur faisons simplement gagner du temps.
Par contre, la lueur sur de visage du "moyen" ou du "pas bon", qui a compris, c'est la dernière image que j'aimerais emporter de cette terre (je ne suis pas pressé...).
PS : la chahuteur qui devient passionné, c’est le bonheur absolu !
Et moi, dans mon fil RSS, quand y'a une alerte pour un nouveau post sur le blog de Carrie B., comme une cloche qui sonne pour m'annoncer une récré, j'ai toujours envie d'être au premier rang des lecteurs pour me délecter de tes paroles...
Je crois qu'on est un paquet dans ta classe à boire tes phrases, que même si tu nous colles des heures de colle on sera pas fâchés !!!
Que même je veux bien redoubler du moment que tu restes ma prof' principale.
Que même je veux bien aller te chercher des craies à l'intendance
Que même je veux bien fayoter tellement c'est du bonheur de te lire
Que même je veux bien essuyer le tableau...
nouvelle retraitée de l'EN je croise le discours du papet. Pas facile de donner la joie et le plaisir d'apprendre.! Le contrat est réussi quand tous viennent avec envie et que le sourire est là dès le matin.
Mais l'enseignant n'en reste pas moins humain avec ses qualités et ses défauts...et certains jours on rentre à reculons dans sa classe. Passé le seuil , le bonheur d'enseigner revient et on laisse ses soucis à la porte.
J'adorais l'école même si malheureusement je n'ai pas pu faire de grandes études comme j'aurais aimé le faire... les aléas de la vie !
Je me suis retrouvée dans ton post... j'ai tjrs détesté l'histoire jusqu'au jour où j'ai eu un prof qui me l'a rendue passionnante. Dans la réussite scolaire le prof ne fait pas tout mais il y est pour beaucoup quand même et j'avoue que je suis inquiète pour mes petits enfants quand on voit combien de profs sont aujourd'hui "démissionnaires"... même si je ne les blâme pas tous et que je reconnais qu'ils ont parfois des circonstances atténuantes voire exténuantes.
Je me souviens de ce prof d'espagnol qui montait sur les tables des élèves qui rêvassaient.
De cet autre qui nous faisait apprendre des chansons de Suzanne Vega
...j'aimais l'école, beaucoup....j'ai toujours cette soif d'apprendre et désormais c'est moi qui fait le programme...
C'est marrant mais les deux profs qui m'ont le plus passionné étaient aussi des profs de lettres. Ils avaient une passion énorme et c'était de sacrés personnages. Je me souviens notamment de mon prof de lycée qui avait une histoire à dormir debout genre sous-officier pendant la guerre d'Algérie qui ne choisit pas le bon camp et qui part s'exiler pendant des années enseigner en Asie. Il n'avait pas son pareil pour vous faire aimer Chateaubriand ! Total respect ! Cela étant j'ai aussi plus tard rencontré de gros cons (je pèse mes mots) à qui je mettrai aujourd'hui bien mon poing dans la figure pour leur faire payer le plaisir qu'ils prenaient à humilier leurs jeunes élèves.
Merci Carrie pour tes posts qui savent susciter le commentaire même en dehors du vibro !
@figueres : Je ne suis pas éternelle, c'est l'école qui l'est!
@papet : Dans tout métier on ne peut pas être au top tout le temps, mais c'est l'intention qui compte, et la passion de fond, la motivation.
J'aurais été une élève assidue et assagie de mon papet préféré ;-)
@Lolo : Je te donne un 20/20 en amitié fidèle en tous cas, attends toi à redoubler quelques années encore...
@muse : C'est une réunion d'anciens de l'EN ici? Oui? J'en suis ravie! C'est aussi l'humanité de l'enseignant qui le rend qui attachant
@shygefe : D'accord avec toi, le prof ne fait pas tout, mais il y contribue, et je comprends aussi la démotivation de certains profs d'aujourd'hui confrontés à la violence et à l'irrespect.
@Sardine : Faire le programme, quel délice! A l'école des sardines on apprend aussi l'espagnol?
@richard : C'est bien on va pouvoir se faire des parties de scrabble (avec des variantes).
Des cons, y en a partout et merci à toi de commenter tant sur le vibro que là...
Arrête ton char, Ben Hur !
Ayant commencé sans formation, comme remplaçant (je ne suis pas passé par l'EN), il valait mieux ne pas tomber sur moi, comme instit. Ce n'était pas tout à fait de ma faute, mais j'étais nul.
Ce n'est que 5 ans plus tard, dans les classes pratiques, CPPN (pour ceux qui ont connu)que j'ai eu une formation et que j'ai trouvé la façon d'enseigner qui me correspondait.
zut, j'ai oublié de signer !
Sont magnifiques tes mots... malheureusement je n'ai jamais eu de professeur qui aie réussi à me réconcilier avec la lecture, alors l'écriture pense-tu !
Mais à te lire j'aurais presque envie de retourner sur les bancs.
(Pour info, j'dessinais en cours :/)
du CarrieB , du pur toi .....
c'est bon ,et tellement pas surprenant ......
j'adhère ,comme toujours ......
Ben moi, ce que j'aime (depuis l'autre côté du bureau) c'est le gamin qui a le regard accroché à mes grimaces, celui qui comprend que j'ai envie de le faire rire pour mieux lui faire avaler la pilule de la grammaire...ou d'autres nourritures spirituelles indigestes!!
Et oui, Papet Croûton, je suis d'accord avec toi, c'est encore plus génial quand on trouve cette étincelle dans un oeil habituellement éteint...
Quand aux "CPPN" (maintenant, on dit "SEGPA") j'y ai goûté comme tous les débutants, et j'en ai bavé joyeusement (et sans formation bien sûr)...avant de revenir face à un public plus "ordinaire".
Mais j'ai appris beaucoup, et notamment que la relation entre l'adulte et l'enfant est le catalyseur d'un apprentissage réussi...on n'enseigne pas correctement si on n'y met pas de l'âme, si on ne fait pas autant d'efforts que le gamin qui souffre, si on ne met pas la dose de dérision nécessaire au bien être de la classe.
N'en déplaise aux amateurs du "professionnalisme détaché", je ne me vois pas agir autrement qu'avec mes tripes...
Alors des fois j'explose, je hurle je tape du pied...(c'est ma manière à moi de leur faire sentir que leur réussite compte à mes yeux)
...et l'heure d'après, je partage un fou-rire avec eux...
En tout cas, merci Carrie...il est beau ton texte!
bon, au risque de paraitre bien superficielle, moi , mon trophée ce n'était pas les bons points mais les amoureux...
mon prof de math de 6°, lui me rendait les copies en riant... tu feras mieux la prochaine fois !! et dans les yeux de mes profs de français, je pouvais lire de l'encouragement, du " je sais que tu peux...", souvent quand j'écris sur mes carnets ou sur mon blog, je pense à elle... Me Cambronne...
@papet anonyme : Je t'aurais lancé des avions en papier couverts de rimes alors, ou je t'aurais imité : c'est ce que je préfèrais faire avec les profs bof bof
@Stefie : En tous cas j'aime beaucoup quand tu écris, et encore plus quand tu dessines! Mais là ça s'appelle du talent
@ma fée : Surtout ne dis jamais combien je te paie, d'accord?
@miss Tortue : Je me doutais bien que le sujet t'inspirerait!
Il est clair que la relation enseignant enfant est partie intégrante du cours et que même si les parents rabâchent : "c'est pour ton avenir à toi, ton prof tu t'en fiches", on ne peut pas mettre les sentiments de côté
@barberine : Entre nous, ça ne m'empêchait pas de collectionner les amoureux non plus ;-)
Mme Cambronne? De la famille du Général? "la garde meurt et ne se rend pas?", le mot à 5 lettres?
Ah la passion! J'ai toujours adoré mes bons profs de français, et toujours emmerdé les mauvais en les reprenant sans cesse sur leurs fautes... Un des rêves les plus tenaces du papillon est de faire partager sa passion... Porter les élèves là où ils pensaient ne trouver que des phrases sans âme, pour leur faire découvrir les charmes sans fond de l'écriture...
Je garde moi aussi un souvenir exceptionnel de mon prof de Francais, qui m'enseignait aussi l'education civique et les arts plastiques au collège...j'étais véritablement en admiration devant son savoir, sa sagesse et son talent.J'ai bu chacune de ses paroles, écouté avec attention chacune de ses anecdotes...jamais un prof semblable ne s'est présenté dans mon parcours scolaire par la suite...
Va savoir pourquoi mais moi j'ai de très bon souvenir du bistrot d'en face, chaque année je passais dans la classe supèrieure avec mention...et non je ne regrette rien!!
C'était bien, la rentrée... tu aurais pu aussi évoquer l'odeur des cahiers neufs, des trousses, des crayons, sans parler de la colle en pot...
Et les potes... et les billes... et les albums de foot (bon, là, c'est plus pour les gars...)... et les filles embrassées à la dérobée... et les profs qu'on aime et ceux qu'on n'aime pas... et la bouffe de la cantine...
@la féline : Le papillon déploiera-t-il ses ailes pour rejoindre l'éducation nationale? Nous le saurons d'ici quelques années...
@alex : Il était plutôt polyvalent ton prof, dis donc? Je crois savoir de qui tu parles, je crois même que je l'ai eu aussi ;-)
@miro : Moi aussi j'ai eu mes bistrots fétiches avec mes petites habitudes, maintenant j'ai le tien!
@NicMo : Eh oui, il en reste à dire, on pourrait en faire un bouquin à évoquer tous ces souvenirs de classe, d'ailleurs je n'exclus pas d'en reparler un jour!
Ah, la colle Cléopâtre, ah les porte-plume, les albums Sarah Kay...
Sarah Kay, aucun souvenir.
Mais j'en ai entendu parler par des filles autour de moi, les yeux humides d'émotion qui étreint leur "p'tit coeur tout mou"...
Très joli texte, oui ça rappelle des souvenirs de profs extraordinaires, de rentrées qui se suivent sans jamais se ressembler...
Moi aussi j'ai eu mes coups de coeur et mes lassitudes concernant les profs. Je me souviens notamment de 2 profs de francais du collège qui m'ont donné le goût de l'écriture, et d'un prof de philo qui ne suivait qu'une trame précise : nos idées. Il nous renvoyait dans nos retranchements pour mieux nous connaître et nous passionner.
Mais celles que je regrette le plus sont mes instit' de maternelle. Et tout l'univers cocoonisant qui s'en approche.
Bon, y a plus qu'à faire des ptits et retrouver à travers eux la bonne odeur des crayons de couleur fraîchement taillés. Y a pu qu'à !
Ben moi les profs je les aime bien, surtout ceux de terminale...
Ben quoi, j'aime les hommes murs!!
et vu le bordel que toi et Stefie avez mis sur le blog de la fée et de la rousse, j'imagine que t'as dû passer du temps dans ton bistrot fétiche, parce que côté "levé du coude" t'as l'air douée!!!
j'confirme ç'quà dit Miro...
Mettre un tel souk chez une copine... t'as pas honte ?
L'alccol n'excuse pas tout, m'enfin !
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